« L’historiographie du priscillianisme (1559-2012) »

Ce conflit religieux du IVe siècle nous renvoie aux racines du christianisme ibérique. Il a fait couler beaucoup d’encre après avoir fait couler bien du sang dans l’Antiquité tardive, en commençant par celui de son fondateur : Priscillien, évêque d’Ávila. Ce mouvement a été l’occasion de controverses au cours des siècles, rouvrant le débat, désormais classique, entre orthodoxie et hétérodoxie. Il a opposé les priscillianistes et les antipriscillianistes de la fin de l’Antiquité ; il a reparu dans les joutes entre catholiques et protestants depuis le XVIe jusqu’au début du XXe siècle. Aujourd’hui, avec les travaux d’histoire et d’anthropologie religieuse (Fontaine, Chadwick, Escribano, Burrus, Simões, Olivares, Veronese, Ventura), ce débat classique est dépassé. Au XXIe siècle, les spécialistes tentent de situer le mouvement au cœur de la spiritualité du IVe siècle, au moment de l’émergence de nouveaux courants ascétiques et des premiers développements du monachisme.
Nous nous proposons de dresser une historiographie précise, mais non exhaustive, des travaux sur le priscillianisme depuis le XVIe siècle?. Notre objectif est triple : d’abord, expliquer les différentes lectures de l’affaire Priscillien, en évaluant l’apport des découvertes successives à la connaissance de ce phénomène religieux ; ensuite, orienter l’état de la question vers la problématique qui nous retient : les connexions entre priscillianisme, manichéisme et gnosticisme du IVe au VIe siècle ; enfin, montrer l’évolution de l’historiographie sur l’Antiquité tardive dans le domaine de la patristique latine, en matière d’hérésiologie .
Le découpage chronologique a été préféré au plan thématique, pour montrer surtout l’évolution des recherches au cours du XXe siècle. L’originalité de ces quelques pages, par rapport aux travaux antérieurs, réside dans l’analyse détaillée des études des trente dernières années, que nous avons regroupées sous le titre « anthropologie religieuse ».
Les dates de transition correspondent à des changements notables dans l’heuristique. La publication des Traités de Wurtzbourg par Schepss (1889) a révolutionné la vision que l’on avait du mouvement dissident. La parution des livres de Goosen et de Chadwick (1976), ainsi que la découverte de Divjak (1981) marquent une nouvelle étape dans la façon de considérer le priscillianisme dans le cadre plus large de la spiritualité dans l’Antiquité tardive.

Sommaire :
I. – L’ÂGE D’OR DE LA TRADITION HÉRÉSIOLOGIQUE (1559-1885)
1- La tutelle théologique entre Réforme et Contre-Réforme
2- L’impact du renouveau méthodologique de la fin du XVIIe siècle
3- L’influence de l’historicisme et du positivisme au XIXe siècle

II. – L’ÈRE DES GRANDES DÉCOUVERTES (1885-1976)
1- Les découvertes de Schepss (1885-1930)
2- Vers le concept d’Antiquité tardive (1930-1976)
3- Mutations des centres d’intérêt et des méthodes de recherche

III. – L’ANTHROPOLOGIE RELIGIEUSE (1976-2012)
1- Deux thèses novatrices et le nouvel élan des travaux espagnols
2- La découverte de Divjak (1981)
3- Le renouvellement historiographique (depuis 1990)

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